La parole est à Estelle, fondatrice de Signé Péro, une entreprise spécialisée dans l'impression et la création textile. Mais aussi plus récemment, dans la réparation de machines à coudre. Elle nous parle de son activité et de ses débuts.
Bonjour Estelle, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Bonjour ! Je m'appelle Estelle, j'ai 42 ans et je suis maman de 3 adolescents. J'habite en Haute-Savoie et j'ai créé l’entreprise Signé Péro en 2019. Je suis créatrice en mercerie textile et propose des services de broderie, d’impression et de flocage. Je propose également des coupons de tissus illustrés (30x30 cm de base) que je vends à des couturières. Cela leur permet de personnaliser des poches, des trousses, des accessoires ou tout autre textile pour leurs clients.
Depuis plus récemment, je propose aussi un service de révision et de réparation de machines à coudre. J'observe, depuis le confinement, une forte demande de ce genre de services, de la part de clients particuliers qui se remettent à la couture.
Et que faisiez-vous avant de vous lancer dans cette activité ?
J'ai été aide-soignante pendant longtemps et je faisais de la couture en plus sur mon temps libre. En 2019, je suis tombée malade et après quelques difficultés avec mon employeur et une rupture conventionnelle refusée, j'ai décidé de démissionner.
Cela a été une décision importante mais je me suis dit que c'était le moment ou jamais. Et je ne le regrette pas une seconde !
Bon, je dois dire que j'ai un rythme assez particulier. Je suis par exemple plus efficace le soir, entre 18h et 23h et grâce à mon activité je travaille à mon rythme et selon des horaires qui me correspondent mieux. J'ai aussi plus de temps et moins de stress pour m'occuper de mes enfants.
Quelles ont été les étapes de la création de votre projet (financement, business plan, étude de marché...) ? À qui vous êtes-vous adressée pour la création de votre entreprise ?
Avant tout, ma première idée d'entreprise était de faire de l'impression sur textile (tee-shirts et accessoires) pour vendre notamment sur les marchés, mais j'ai vite changé l'idée de mon projet pour proposer de la mercerie personnalisée grâce à des coupons brodés ou imprimés.
Lorsque j'ai pris la décision de démissionner, je me retrouvais sans ressources, avec des enfants, et j'ai dû apprendre rapidement à créer et pérenniser une entreprise. Pour ça, la Chambre des Métiers et de l'Artisanat (CMA) m'a bien accompagnée, que ce soit pour le choix de mon statut, ou pour la création de la structure directement.
J'ai aussi fait appel à l'ADIE (association pour le droit à l'initiative économique), leur aide a été précieuse.
Quelles ont été les difficultés que vous avez rencontrées au cours de cette aventure ?
Il y en a eu plusieurs !
Lorsque j'ai commencé cette aventure, j'étais encore malade et je rencontrais des problèmes de concentration et de fatigue. Financièrement aussi c'était assez compliqué, sans salaires, sans soutiens de mon entourage. Une vraie épreuve !
Je pense d'ailleurs que le manque de soutien (par incompréhension ou méconnaissance de l'entrepreneuriat souvent, pas par méchanceté) est très dur à surmonter. Il faut une force mentale que je ne pensais pas avoir pour continuer à y croire et aller de l'avant. Pour rester déterminée.
La seconde difficulté a été d'obtenir un prêt pour financer mes équipements et mon projet de manière générale. Bien sûr, au début il m'a été refusé. Je n'avais ni garants, ni salaires donc c'était compréhensible.
Et puis ma conseillère bancaire, contre toute attente, m'a fait confiance. Elle m'a obtenue un prêt qui m'a permis d'acheter ma première imprimante ainsi que le consommable. Pour le reste (site internet, communication, etc.) mes économies m’ont aidées à me lancer.
Comment s'est passé le lancement de votre activité ?
J'ai créé mon entreprise en 2019 mais mon activité a vraiment démarré en juin 2020. Je dois dire qu'au début, les ventes ne décollaient pas et il a fallu s'accrocher. Mais c'est fascinant de voir à quel point notre idée de base peut évoluer au fil des rencontres. Par exemple, un jour que j’étais en rendez-vous à la Chambre des métiers, j’ai réalisé que je ne proposais rien pour les enfants. C’est là que j’ai orienté une partie de mes productions pour « la ménagère ».
Ça n'est pas un terme péjoratif pour moi. Beaucoup de femmes, jeunes mamans ou non, souhaitent coudre en personnalisant leur ouvrage et me commandent des coupons. Et c'est une part importante de mon activité aujourd'hui.
Petit à petit j'ai créé un site internet avec Ionos et communiqué sur Facebook (j'exploite peu Instagram même encore aujourd'hui), les retours clients en commentaires m'ont aidée à avoir d’autres clients grâce au mécanisme de preuve sociale. J’ai d’autre part créé des offres ou des promotions (pour la fête des pères par exemple), qui génèrent de l’engouement.
À qui s'adresse votre projet ? Quel est votre petit "plus" par rapport aux autres ?
En plus des particuliers et des mamans qui cousent les coupons que je vends, mes clientes sont principalement des couturières qui utilisent mes coupons pour des sacs ou accessoires et qui font de la revente.
Je suis cliente dans la mercerie depuis plus de 20 ans et je comprends bien ma clientèle. Aujourd'hui il y a des défis que je souhaite relever dans ce milieu, comme le fait de proposer une gamme complète qui évite aux clients de commander via différents sites et donc d'additionner les frais de ports.
Comment exercez-vous cette activité et comment la développez-vous ?
Grâce à internet je peux travailler de mon appartement.
Je développe mon entreprise principalement avec de la publicité Facebook et depuis peu, je propose mes créations sur la plateforme Etsy. Cette plateforme est très intéressante et un client satisfait peut en générer beaucoup d'autres !
D'une manière générale, mon activité m'ouvre beaucoup de possibilités, je souhaiterais par exemple investir dans un local pour travailler et faire de l'achat / revente.
Je peux aussi proposer des produits complémentaires comme des services de révision et réparation de machines à coudre. C'est d'ailleurs la prochaine étape de mon projet, investir dans une camionnette afin de pouvoir me déplacer au domicile de mes clients pour effectuer ce service. Il y a une réelle demande ! Certainement dû au confinement qui a fait revenir les gens vers la couture.
C'est ce que j'aime avec cette aventure entrepreneuriale, pouvoir faire grandir un projet au fur et à mesure sans se limiter.
Quels bénéfices personnels tirez-vous de cette activité ? Qu'avez-vous appris de cette expérience ?
Entreprendre m'a permis de me remettre en question.
Il m'a fallu plus d'un an pour me relever de ma maladie et j'interprète ça comme un signal que mon corps m'a envoyé. Une façon de me dire que la vie et le travail que j’avais avant ne me convenais pas. Je n’arrivais plus à être salariée, à travailler aux horaires qu’on m’imposait. Je pense que j’ai appris à vivre et plus à simplement exister.
Quel conseil donneriez-vous aux futurs entrepreneurs ?
De croire en eux. J'ai accroché quelques mantras au mur de chez moi et ils m'aident certains jours plus compliqués que d'autres.
Il y en a un que j'aime bien qui dit : Si la vie te donne du fil à retordre apprend à tricoter.
Mais j'insisterais aussi sur l'importance de se former auprès des bons interlocuteurs. D'aller chercher des informations fiables, car beaucoup d'entrepreneurs ne savent pas ce qu’ils font et ça peut coûter cher. Typiquement, la Chambre des métiers (CMA) sert à vous aiguiller au mieux dans la création de votre entreprise.
Je conseille donc de se former tout au long de l'aventure entrepreneuriale. En faisant cette démarche de formation, j'ai avancé bien plus vite sur la création de mon activité, mais aussi sur la création de visuels ou de mon site internet. C'est un formidable accélérateur.