Est-il obligatoire de faire un état des lieux pour un bail commercial ?
Un état des lieux obligatoire pour protéger le locataire commerçant
La loi Pinel du 18 juin 2014 a pour objectif une meilleure protection du locataire d’un local commercial. Elle fait partie du plan d’action pour le commerce et les commerçants.
Ainsi, elle renverse un principe existant : un local commercial est présumé ne pas être loué en bon état.
En outre, la loi Pinel impose la réalisation d’un état des lieux d’entrée et d’un état des lieux de sortie pour les locaux commerciaux. Cette obligation de réaliser un état des lieux conditionne la validité du bail commercial !
L’article L 145-40-1 du Code de commerce prévoit les modalités de réalisation de l’état des lieux du local commercial.
Bon à savoir
Un état des lieux d’entrée et un état des lieux de sortie sont également obligatoires pour un local professionnel. Toutefois, les locaux professionnels sont supposés être loués en bon état. La loi est donc moins protectrice des locataires.
Les objectifs de l’état des lieux dans un local commercial
L’état des lieux d’entrée indique l’état dans lequel se trouve le local commercial, au début du bail.
Lors de la fin du contrat de location, il sera plus simple d’établir les dégradations imputables au locataire, par rapport à cette situation initiale. En effet, le locataire a l’obligation de restituer le local commercial en bon état.
A l’issue de cet état des lieux, propriétaire et locataire déterminent la répartition des travaux et des charges.
Les modalités de l’état des lieux d’un local commercial
La loi Pinel impose la signature d’un état des lieux à plusieurs moments de la vie du bail commercial :
lors de sa signature ;
lors de la fin du bail, quelle qu’en soit la raison (résiliation à échéance triennale, non-renouvellement, résiliation pour faute) ;
au moment de la cession du droit au bail ;
lors d’une mutation à titre gratuit du bail commercial ;
lors d’une cession du fonds de commerce (qui inclut la cession du droit au bail).
En outre, l’état des lieux doit se tenir de manière contradictoire. Ainsi, un état des lieux réalisé par une seule partie, locataire ou bailleur, est nul.
Il se réalise aussi à l'amiable entre les deux parties ou avec des tiers, mandatés par elles. Si un état des lieux amiable n’est pas possible, le recours à un commissaire de justice est envisageable.
Enfin, l’état des lieux signé par le locataire et par le bailleur doit être annexé au bail commercial, ou est à conserver par chacune des parties.
Comment faire un état des lieux dans un local commercial ?
Pour réaliser un état des lieux dans le cadre d’un bail commercial, respectez les mentions obligatoires et soyez vigilant lors de sa réalisation.
Quelles sont les mentions obligatoires d’un état des lieux pour un local commercial ?
L’état des lieux comporte au minimum les informations suivantes :
identités du bailleur et du locataire,
adresse du bailleur,
identification et adresse du local commercial,
descriptif de chaque pièce et de chaque annexe du local commercial,
relevé des compteurs,
inventaire des clés remises,
inventaire de tous les équipements et leur état.
Bon à savoir
Les bénéficiaires d’un bail commercial doivent veiller à la rédaction de chaque clause du contrat. En particulier, les obligations d’entretien et de réparation mises à la charge du locataire. Cela conditionne quelles sommes seront imputables en fin de bail au locataire et au bailleur. Le bail commercial est un contrat compliqué : n'hésitez pas à vous faire accompagner par un professionnel du droit.
Quels points faut-il vérifier lors de l’état des lieux ?
Précision et examen minutieux sont les mots-clés d’un état des lieux réussi.
Vous devez vérifier chaque pièce du local commercial et chaque élément, notamment :
l’installation électrique (prises électriques, lampes, interrupteurs, système électrique de fermeture d’un rideau pour la vitrine) ;
le bon fonctionnement de l’installation de chauffage ;
l’installation du système de sécurité, le cas échéant (digicode, système d’alarme) ;
les serrures, les clés et les poignées des portes et des fenêtres ;
le revêtement des murs, sols et plafonds, pièce par pièce ;
l’état des portes, vitres, fenêtres et vitrines ;
les équipements rattachés au local commercial ;
l’état du mobilier éventuel qui doit faire l’objet d’un inventaire détaillé.
Ajoutez des photos !
Nous vivons dans un monde d’images : rien de plus simple que de prendre en photo les éléments mentionnés. Certains logiciels d’état des lieux permettent de les ajouter automatiquement au document réalisé.
Cela renforce une description parfois imprécise : que signifie un mur en bon état ? Quelle différence entre un plafond en bon état et en très bon état ?
Ainsi, chaque remarque portée sur l’état des lieux peut être corroborée par une photo : si vous mentionnez “présence de quelques fissures sur le mur”, une photo desdites fissures avec leur localisation précise dans le local permettra de constater toute modification anormale lors de l'état des lieux de sortie.
Chaque élément doit être décrit, photographié et localisé avec précision.
Qui paie l’état des lieux ?
Si l’état des lieux d’entrée s'établit entre locataire ou propriétaire, il ne coûte rien. Si un tiers représente l’une des parties, le mandant se charge d’assumer le coût éventuel.
Dans tous les cas, le bailleur ne peut mettre de frais d’état des lieux à la charge du locataire.
En revanche, si l’état des lieux ne peut se réaliser à l’amiable, l’intervention d’un commissaire de justice se partage par moitié entre bailleur et locataire. L’initiative de l’intervention revient à la partie la plus diligente.
Comment se passe l’état des lieux de sortie d’un local commercial ?
L’état des lieux de sortie est essentiel. Il compare la situation à l’entrée du local commercial et en fin de bail commercial.
Or, la durée du bail commercial s’échelonne sur le temps long (3,6 9 ans voire plus en cas de renouvellement). Il est donc essentiel de distinguer l’usure normale du bien immobilier (appelée vétusté) de l’usure anormale ou des dégradations imputables au locataire.
La vétusté
La vétusté ne peut pas faire l’objet d’une retenue sur le dépôt de garantie ou d’un paiement quelconque par le locataire. Elle correspond à l'usure normale du local commercial et se situe principalement sur les revêtements de murs, sols et plafonds.
En clair, le propriétaire ne peut vous reprocher que les murs soient jaunis après 9 ans sur place. Votre dépôt de garantie n’a pas vocation à lui financer la remise à neuf des peintures.
La fin du bail commercial côté bailleur n’est pas toujours simple : les frais liés à la vétusté restent à la charge du propriétaire.
Les dégradations du local commercial
En revanche, les frais liés à des dégradations causées par le locataire sont imputables à ce dernier.
D’où l’importance de comparer minutieusement l’état des lieux de sortie à l’état des lieux d’entrée.
Le bailleur retient le montant des travaux sur le dépôt de garantie du locataire. Le locataire devra alors effectuer la mise en conformité du local commercial.
Si des dommages se sont produits dans le local commercial, le locataire doit démontrer qu’ils ne sont pas de son fait. Telle est la décision de la Cour de cassation (13 octobre 2021).
Les juges ont rappelé que le locataire assume la responsabilité des dégradations observées dans l’état des lieux de sortie du local commercial. Certaines activités du locataire conduisent à des détériorations plus importantes que d’autres. Une seule exception : le locataire démontre que lesdites dégradations se sont produites sans qu’il soit fautif.